dimanche 12 février 2017

Le Nouveau et la résistance au Nouveau




J'ai lu récemment (dans le Journal intégral d'Olivier Breteau)
 cette remarque que je trouve très juste :

porteurs d'une quadruple révolution silencieuse 
dans le domaine écologique, 
dans celui du rapport entre hommes et femmes, 
dans la quête d'une spiritualité non dogmatique 
et dans une ouverture multiculturelle (...)  
représentent le symétrique exact 
du quatuor mortifère symbolisé par Trump :
 irresponsabilité écologique, machisme,
 intégrisme culturel et religieux,
 racisme et défense délirante d'une suprématie des Blancs."

Il est vrai que la symétrie est flagrante.
On a là le Nouveau...et la résistance au Nouveau.

A bien y regarder, notre monde paraît aujourd'hui
partagé en deux camps antagonistes :
le camp de ceux (et celles) qui, suivant le "courant du temps",
s'engouffrent dans le "tourbillon du changement"
et celui de ceux qui, apeurés, y résistent de toutes leurs forces...
ne veulent pas lâcher la rive,
et s'arc-boutent sur les anciennes valeurs.

On traite les premiers d'utopistes...
et les seconds d'intégristes.
Pour chaque groupe, bien évidemment, 
le "diable" est de l'autre côté...

Les tensions entre les deux tendances sont parvenues à leur comble...
et beaucoup se demandent, avec un peu d'effroi, et pas mal d'appréhension,
de quel côté la balance finira par pencher...

La vérité est peut-être que, loin d'être une situation purement extérieure, 
le "combat" fait d'abord rage à l'intérieur de chacun de nous :
Reconnaissons honnêtement, qu'en ce moment, nous sommes tous, peu ou prou,
en proie à un conflit entre une envie irrépressible de "plonger dans l'avenir"
et la peur de lâcher nos habitudes et nos vieilles certitudes.
Tiraillés entre ces deux élans, déchirés par nos contradictions, 
nous faisons un pas en avant puis un en arrière...
dansant d'un pied sur l'autre 
sans parvenir à nous décider. 

La situation mondiale est le parfait "reflet"
de ce qui se passe dans nos consciences individuelles. 
C'est bien notre "balance intérieure" qu'il convient d'équilibrer...
et cela, en évitant deux extrêmes
qui seraient tous deux sources de danger...

Le premier danger est le "saut" inconséquent et prématuré dans le vide...
le rejet brusque et radical de tout le passé
(attitude qui ne peut que susciter une "réaction inverse" en retour)
et le second est le refus obstiné de s'ouvrir à de nouvelles vues
et à une transformation de fond qui s'annonce inévitable.

Tout va très vite, tout se précipite...
Or, il faut du temps pour "intégrer" le Nouveau.
Car, comme le dit Edgar Morin,
cela n'implique pas seulement de changer l'extérieur de nos vies,
cela implique avant tout de "se changer soi-même".
La tâche est immense.
On ne peut y arriver du jour au lendemain.
Et beaucoup ne sont pas prêts.

Notre époque est un "sas", un seuil, un passage...
elle nous invite à "lâcher" progressivement
mais résolument, nos "sécurités"
et à nous avancer tous ensemble
vers l'inconnu, vers une Renaissance...
d'une ampleur jamais vue.
Elle nous invite à abandonner nos visions périmées
et à nous ouvrir à une "nouvelle conscience".
Elle nous invite, en même temps, à quitter une civilisation
et à en créer une nouvelle.

Cela suppose, aussi bien individuellement que collectivement,
des avancées et des reculs,
des "allers-et- retours" entre progrès et régression...
Historiquement, cela se passe presque toujours ainsi.
Le progrès n'est pas "linéaire"...
Les "bonds en avant" sont très souvent accompagnés
de phases - temporaires - de retour en arrière. (*)
De fait, ces phases "d'opposition" sont presque une bonne nouvelle :
elles sont le signe que le mouvement est "en marche"...
le signe qu'il est devenu suffisamment "puissant" et suffisamment "visible"
pour qu'on y résiste ! (**)
Les crispations identitaires ne font que mettre en évidence
la force inexorable du courant contraire.

Il serait bien sûr naïf d'imaginer
que cette Mutation , cette "Renaissance"
 puisse se faire sans crise et sans douleurs...
car c'est là le propre de tout "accouchement"...
et celui d'une nouvelle civilisation ne fait pas exception.
Mais, comme dans toute naissance,
on supporte ces "contractions" avec d'autant plus de patience
qu'on en connaît la finalité.
Un nouveau monde nous attend, soyons-en certains...
Il viendra...
Naturellement ou "sous forceps",
en douceur ou dans le drame...
(c'est à nous d'en décider)
mais il viendra !

Beaucoup de choses dépendront de notre "participation"
(ou non) à cet avènement,
la situation n'est pas exempte de dangers vitaux,
mais j'ai envie de croire que le Nouveau l'emportera
(écologie, rapport apaisé hommes/femmes,
fin des dogmes et société multiculturelle)
et que dans vingt ans,
après le "grand changement",
après l'émergence globale d'une "nouvelle conscience"
nous pourrons nous pencher sur les années en cours
en les regardant comme les dernières "résistances",
les derniers "soubresauts"...
avant la délivrance !

La Licorne
.

(*) Ainsi, pour l'abolition de l'esclavage,
 il a fallu s'y prendre à plusieurs fois.
(Napoléon l'avait rétabli en 1802)

Et il en est de même pour l'abolition de la monarchie,
et l'établissement d'un autre régime
qui, malgré tous les espoirs de la Révolution,
ne s'est pas imposé sans moults "retours en arrière".
.

(**)  "Toute vérité franchit trois étapes.
D'abord, elle est ridiculisée.
Ensuite, elle subit une forte opposition.
Puis, elle est considérée comme ayant été une évidence."
(Arthur Schopenhauer)

La première étape est franchie,
nous en sommes à la deuxième...
juste avant l'évidence... ;-)
.


4 commentaires:

  1. Très bonne analyse et qui donne plein d'espoir. A nous de faire en sorte que cet "accouchement" s'effectue sans trop de douleur.

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    1. Merci Francine...oui, il faut garder l'espoir...et tenir bon, dans les remous qui ne manqueront pas d'advenir.
      Et toi, as-tu "accouché" de nouvelles toiles ces derniers temps ? :-)

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  2. Un texte passionnant et utile pour tous ceux qui veulent échapper à l'idiotie galopante. Amitiés.

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    1. Dans une époque compliquée, beaucoup se "raccrochent" à des idées simplistes...ce qui ne les rend pas plus intelligents, c'est sûr...
      Et les médias, sur ce point, ont aussi leur part de responsabilité.

      Belle soirée !

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