vendredi 26 octobre 2018

Nous ne pouvons pas tout avoir




Nous faisons tous face à des choix.

Nous pouvons avoir des calottes glaciaires et des ours polaires,
ou nous pouvons avoir des automobiles.

Nous pouvons avoir des barrages
ou nous pouvons avoir des saumons.

(...)
 Nous pouvons avoir le pétrole du fond des océans,
 ou nous pouvons avoir des baleines.

Nous pouvons avoir des boîtes en carton
ou nous pouvons avoir des forêts vivantes.

 Nous pouvons avoir des ordinateurs
et la myriade de cancers qui accompagne leur fabrication,
 ou nous pouvons n’avoir aucun des deux.

Nous pouvons avoir l’électricité
et un monde dévasté par l’exploitation minière,
ou nous pouvons n’avoir aucun des deux
(...)

Nous pouvons avoir la civilisation
— trop souvent considérée comme la plus haute forme d’organisation sociale —
 qui se propage (qui métastase, dirais-je) sur toute la planète,
 ou nous pouvons avoir une multiplicité de cultures autonomes uniques
 car spécifiquement adaptées au territoire d’où elles émergent.

Nous pouvons avoir des villes et tout ce qu’elles impliquent,
ou nous pouvons avoir une planète habitable.
.
Nous pouvons avoir le « progrès » et l’histoire,
 ou nous pouvons avoir la soutenabilité.

Nous pouvons avoir la civilisation,
ou nous pouvons au moins avoir la possibilité d’un mode de vie
qui ne soit pas basé sur le vol violent de ressources.

Tout cela n’est absolument pas abstrait.
 C’est physique.
Dans un monde fini,
 l’importation forcée et quotidienne de ressources
est insoutenable.
Hum.



Montrez-moi comment la culture de la voiture peut coexister avec la nature sauvage,
et plus particulièrement, comment le réchauffement planétaire anthropique
peut coexister avec les calottes glaciaires et les ours polaires.

N’importe laquelle des soi-disant solutions
 du genre des voitures électriques solaires
présenterait des problèmes au moins aussi sévères.

L’électricité, par exemple, a toujours besoin d’être générée,
les batteries sont extraordinairement toxiques,
et, quoi qu’il en soit, la conduite n’est pas
le principal facteur de pollution de la voiture :
bien plus de pollution est émise au cours de sa fabrication
qu’à travers son pot d’échappement.

La même chose est vraie
de tous les produits de la civilisation industrielle.

Nous ne pouvons pas tout avoir.


Cette croyance selon laquelle nous le pouvons est une des choses
 qui nous ont précipités dans cet horrible endroit.
Si la folie pouvait être définie
comme la perte de connexion fonctionnelle avec la réalité physique,
 croire que nous pouvons tout avoir.

— croire que nous pouvons simultanément
démanteler une planète et y vivre ;
croire que nous pouvons perpétuellement
utiliser plus d’énergie que ce que nous fournit le soleil ;
 croire que nous pouvons piller du monde
plus que ce qu’il ne donne volontairement ;
 croire qu’un monde fini peut soutenir une croissance infinie,
qui plus est une croissance économique infinie,
qui consiste à convertir toujours plus d’êtres vivants en objets inertes
 (la production industrielle, en son cœur, est la conversion du vivant
 — des arbres ou des montagnes — en inerte
— planches de bois et canettes de bière) —

 est incroyablement cinglé.

Cette folie se manifeste en partie par un puissant irrespect
pour les limites et la justice.
Elle se manifeste au travers de la prétention
selon laquelle il n’existe ni limites, ni justice.

Prétendre que la civilisation peut exister
sans détruire son propre territoire,
ainsi que celui des autres et leurs cultures,
c’est être complètement ignorant de l’histoire, de la biologie,
de la thermodynamique, de la morale,
et de l’instinct de conservation.

Et c’est n’avoir prêté absolument aucune attention
aux six derniers millénaires.

Derrick Jensen


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