Quasi-centenaire, le sociologue, éternel optimiste,
envisage le confinement comme une occasion inespérée
de régénérer la notion même d’humanisme,
mais aussi pour chacun d’opérer un tri
entre l’important et le frivole.
.
Simon Blin
Ce qui est très intéressant, dans la crise du coronavirus,
c’est qu’on
n’a encore aucune certitude sur l’origine même de ce virus,
ni sur ses
différentes formes, les populations
auxquelles il s’attaque, ses degrés
de nocivité…
Mais nous traversons également une grande incertitude
sur
toutes les conséquences de l’épidémie
dans tous les domaines, sociaux,
économiques...
Mais en quoi ces incertitudes forment-elles, selon vous,
Mais en quoi ces incertitudes forment-elles, selon vous,
le lien entre ces toutes ces crises ?
E.M. : Parce que nous devons apprendre à les accepter
E.M. : Parce que nous devons apprendre à les accepter
et à vivre avec elles,
alors que notre civilisation nous a inculqué
le besoin de certitudes
toujours plus nombreuses sur le futur,
souvent illusoires, parfois
frivoles, quand on nous a décrit avec précision
ce qui va nous arriver
en 2025 ! L’arrivée de ce virus doit nous rappeler
que l’incertitude
reste un élément inexpugnable de la condition humaine.
Toutes les
assurances sociales auxquelles vous pouvez souscrire
ne seront jamais
capables de vous garantir que vous ne tomberez pas malade
ou que vous
serez heureux en ménage !
Nous essayons de nous entourer d’un maximum de
certitudes,
mais vivre, c’est naviguer dans une mer d’incertitudes,
à
travers des îlots et des archipels de certitudes
sur lesquels on se
ravitaille…
C’est votre propre règle de vie ?
E.M. : C’est plutôt le résultat de mon expérience.
C’est votre propre règle de vie ?
E.M. : C’est plutôt le résultat de mon expérience.
J’ai assisté à tant d’événements
imprévus dans ma vie
– de la résistance soviétique dans les années 1930 à
la chute de l’URSS,
pour ne parler que de deux faits historiques
improbables avant leur venue –
que cela fait partie de ma façon d’être.
Je ne vis pas dans l’angoisse permanente,
mais je m’attends à ce que
surgissent des événements plus ou moins catastrophiques.
Je ne dis pas
que j’avais prévu l’épidémie actuelle,
mais je dis par exemple depuis
plusieurs années
qu’avec la dégradation de notre biosphère,
nous devons
nous préparer à des catastrophes.
Oui, cela fait partie de ma
philosophie :
« Attends-toi à l’inattendu. »
.
.......
Que peut nous apprendre le philosophe que vous êtes
pour passer ces longues périodes de confinement ?
E.M. : C’est vrai que pour beaucoup d’entre nous
qui vivons une grande partie de notre vie hors de chez nous,
ce brusque confinement peut représenter une gêne terrible.
Je pense que ça peut être l’occasion de réfléchir, de se demander
ce qui, dans notre vie, relève du frivole ou de l’inutile.
Je ne dis pas que la sagesse, c’est de rester toute sa vie dans sa chambre,
mais ne serait-ce que sur notre mode de consommation ou d’alimentation,
c’est peut-être le moment de se défaire de toute cette culture industrielle
dont on connaît les vices, le moment de s’en désintoxiquer.
C’est aussi l’occasion de prendre durablement conscience
de ces vérités humaines que nous connaissons tous,
mais qui sont refoulées dans notre subconscient :
que l’amour, l’amitié, la communion, la solidarité
sont ce qui font la qualité de la vie.
.
Edgar Morin et Francis Lecompte
.
pour passer ces longues périodes de confinement ?
E.M. : C’est vrai que pour beaucoup d’entre nous
qui vivons une grande partie de notre vie hors de chez nous,
ce brusque confinement peut représenter une gêne terrible.
Je pense que ça peut être l’occasion de réfléchir, de se demander
ce qui, dans notre vie, relève du frivole ou de l’inutile.
Je ne dis pas que la sagesse, c’est de rester toute sa vie dans sa chambre,
mais ne serait-ce que sur notre mode de consommation ou d’alimentation,
c’est peut-être le moment de se défaire de toute cette culture industrielle
dont on connaît les vices, le moment de s’en désintoxiquer.
C’est aussi l’occasion de prendre durablement conscience
de ces vérités humaines que nous connaissons tous,
mais qui sont refoulées dans notre subconscient :
que l’amour, l’amitié, la communion, la solidarité
sont ce qui font la qualité de la vie.
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Edgar Morin et Francis Lecompte
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