dimanche 3 mai 2020

Dire NON




Il faut dire un NON ferme à la société de surveillance, même temporaire


Jusqu'où les gouvernements sont-ils prêts à aller 
pour faire respecter les nouvelles règles ? 
Surtout, seront-ils capables de revenir en arrière 
une fois la crise passée ? 
.

La pandémie que nous subissons est une crise hors norme. 
Certains ont utilisé le qualificatif de guerre. 
Partout, les citoyens ont peur.
Nous avons peur pour notre santé, pour celle des autres 
et de plus en plus nous sommes terrifiés 
par les conséquences économiques et sociales de cette crise.
La demande numéro un faite aux gouvernants 
est celle d'une double sécurité, sanitaire et économique.

Pour répondre et nous protéger, 
souvent au prétexte paternaliste de nous responsabiliser, 
un peu partout sur la planète,
les responsables gouvernementaux et administratifs
exigent des outils institutionnels supplémentaires.
Pas moins de 84 pays ont ainsi décidé de promulguer des lois d'urgence
 qui donnent des moyens et surtout des pouvoirs exceptionnels aux gouvernements.




Face à un tel cataclysme, il y a eu, côté politique et administratif, 
comme souvent, dans un premier temps, le déni du réel.
 On l'a vu en Chine, aux USA, au Brésil, en Grande-Bretagne... en France aussi ! 
Est ensuite venue la nécessité d'habiller ce qu'on ne comprend pas. 
Puis la narration bascule, on dramatise la situation 
et on ouvre, parfois même dans des régimes normalement très apaisés, 
la porte aux attaques concrètes contre la démocratie.

 Confinements généralisés et sorties extérieures hyper réglementées 
voire couvre-feux, interdiction des grands rassemblements
 et autres manifestations de masse qui ont secouées 
de très nombreuses géographies en 2019, 
report des élections sine die voire pire maintien 
sans que les oppositions puissent faire campagne, 
soutiens financiers distribués de manière sélective, 
censures, répressions violentes 
contre ceux qui dérogent à l' « effort collectif »
 et mettent en danger la nation.




Sans caricaturer le réel, on peut même parfois légitimement 
s'inquiéter de la porosité entre démocraties de crise 
et régimes autoritaires.
L'application d'outils digitaux de surveillance généralisée, 
l'utilisation potentielle de drones, 
l'introduction de capteurs de reconnaissance faciale, 
la mobilisation de délations ... 
gagner la guerre contre le virus 
justifierait le basculement, 
temporaire certes
dans un espace temps hybride entre démocratie 
et société de techno-surveillance autoritaire.




 Un dôme sombre recouvre la vie réelle de certains pays. 
Journalistes, opposants politiques, activistes des droits de l'homme...
 tout l'espace public est paralysé voire attaqué. 
L'opacité domine. La corruption se renforce. 
Et la confiance s'érode.

Lire aussi :


Même en France, l'état d'urgence sanitaire propose 
une série de questionnements au delà des garde-fous.
On peut imaginer qu'une fois la « guerre » enfin gagnée, 
de nombreux gouvernements abandonneront ces pouvoirs d'exceptions. 
Parions aussi que dans certains cas, en particulier là où les racines démocratiques 
sont peu profondes et les contrôles institutionnels approximatifs, 
les situations seront gelées, les pouvoirs maintenus, voire les élections oubliées.


Nous n'avons qu'une seule terrible certitude. 
C'est que, si malheureusement la bataille dure, le coronavirus va ajouter 
de la crise économique, de la pauvreté, des gens vont encore tomber malades,
 d'autres vont mourir et de plus en plus d'habitants de ce Monde 
 vont hurler leurs colères.


Le coronavirus ne sera pas vaincu 
par l'espionnage généralisé de la société de la surveillance, 
encore moins par la propagande et la répression des opposants.
Seuls les résultats concrets seront évalués par les peuples.
Si les gouvernants et leurs administrations ne sont pas en cause 
dans la naissance et la propagation du virus depuis la Chine, 
ce ne sont pas les citoyens qui sont les responsables des hésitations,
 impréparations, erreurs et autres impostures
 qui nous ont conduits dans cette situation inédite et chaotique.  
 Et nous sommes projetés, nous citoyens, 
au cœur de ce grave défi d'un réel démocratique se durcissant 
pour répondre aux attaques du virus.



C'est dans notre vigilance citoyenne que réside l'antidote 
à ces tentatives de détournements politiques et économiques.
Si nous ne sommes pas vigilants, ces dérives pourraient façonner 
la vie civique, la politique, l'économie et nos vies individuelles 
pour les décennies à venir. 

Il ne peut y avoir de doute, nous ne pouvons laisser, ici, 
s'ouvrir la porte et donner l'impression 
que nous aussi nous acceptons 
le « techno-autoritarisme » même soft
seraient même légitimés par nos démocraties.


L'équilibre est instable et fragile 
tant nous sommes inquiets de notre présent 
et terrifiés par l'avenir proche. 
puis surtout nous avons déjà offert 
tant de parts digitales de nous même, de nos vies, 
parfois jusqu'à notre libre arbitre à des acteurs privés, 
cette fois, ceux que nous appelons les GAFAM,
 ceux qui se nourrissent, encore plus depuis le confinement, 
nos servitudes volontaires, et qui, comme par hasard sont à l'affût, 
proposant leurs services « désintéressés » comme la Chine 
avec son Sesame Credit, à des gouvernements démunis.


 
Il faut dire non à la société de surveillance. 
Maintenant.
.

Jean-Christophe Gallien
Politologue et communicant
Enseignant à l'Université de la Sorbonne
le 28 avril 2020
.


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