lundi 25 décembre 2017

Ce que je désire pour Noël

 
 
 
Je sais ce que je désire vraiment pour Noël.
Je veux que mon enfance revienne.
Personne ne va m'offrir ça.
(...)
C'est insensé, je le sais bien,
mais, de toute manière, depuis quand Noël
aurait-il quelque chose à voir avec le sens ?
 
La fête de Noël concerne un enfant d'ailleurs et d'autrefois,
et elle concerne l'enfant de maintenant, en vous et en moi.
Celui qui, derrière la porte de notre cœur,
attend que quelque chose de merveilleux se passe.
.
Robert Fulghum
.
 
 
 
 
 

samedi 9 décembre 2017

Mystère




Toute mort est un mystère parce que toute vie est un mystère.

Jean d'ormesson


mercredi 29 novembre 2017

50 citations de Gandhi




1. "Vis comme si tu devais mourir demain. Apprends comme si tu devais vivre toujours".
2. "La vie est un mystère qu'il faut vivre, et non un problème à résoudre".
3. "Le bonheur, c'est quand vos actes sont en accord avec vos paroles".
4.  "Appeler les femmes le "sexe faible" est une diffamation ; c'est l'injustice de l'homme envers la femme. Si la non-violence est la loi de l'humanité, l'avenir appartient aux femmes".
5. "Les religions sont comme des routes convergeant vers un même point. Qu'importe que nous empruntions des voies différentes, pourvu que nous arrivions au même but".
6. "La haine tue toujours, l'amour ne meurt jamais".
7. "Croire en quelque chose et ne pas le vivre, c'est malhonnête".
8. "On peut juger de la grandeur d'une nation par la façon dont les animaux y sont traités".
9. "Prier n'est pas demander. C'est une aspiration de l'âme".
10. "Soyez le changement que vous voulez voir dans le monde".
11. "Moins on possède, moins on désire".
12. "A l'instant où l'esclave décide qu'il ne sera plus esclave, ses chaînes tombent".
13. "Je m'oppose à la violence parce que lorsqu'elle semble produire le bien, le bien qui en résulte n'est que transitoire, tandis que le mal produit est permanent".
14. "La démocratie devrait assurer au plus faible les mêmes opportunités qu'au plus fort".
15. "La victoire obtenue par la violence équivaut à une défaite, car elle est momentanée".
16. "Que nous devions obéir à toutes les lois, qu'elles soient bonnes ou mauvaises, est une invention récente".
17. "Il y a assez de tout dans le monde pour satisfaire aux besoins de l'Homme, mais pas assez pour assouvir son avidité".
18. "Celui qui dit : "j'agirai ainsi dans la mesure du possible" révèle ou bien son orgueil, ou bien sa faiblesse".
19. "C'est bien dans l'effort que l'on trouve la satisfaction et non dans la réussite. Un plein effort et une pleine victoire".
20. "Cultiver l'humilité revient à cultiver l'hypocrisie. L'humble n'a pas conscience de son humilité".
21. "Une loi doit avant tout être une loi juste. La politique moderne fait de la loi un fétiche simplement parce que c'est la loi".
22. "Là où il n'y a le choix qu'entre lâcheté et violence, je conseillerai la violence".
23. "Aucun pays ne s'est jamais élevé sans être purifié au feu de la souffrance".
24. "Le fait de s'incliner n'humilie pas l'agresseur mais l'élève".
25. "La vie sans religion est une vie sans principes, et une vie sans principes est comme un bateau sans gouvernail".
26. "S'abstenir de punir n'est pardon que quand il existe le pouvoir de punir".
27. "Lorsque nous critiquons, il faut le faire avec une humilité et une courtoisie qui ne laisse subsister aucune amertume".
28. "Là où il y a la peur, il n'y a pas de religion".
29. "La fibre la plus coriace doit s'amollir dans le feu de l'amour. Si elle ne fond pas, c'est que le feu n'est pas assez fort".
30. "Le progrès spirituel exige de nous que nous cessions de tuer les autres êtres vivants pour nos besoins corporels".
31. "Nul être humain n'est trop mauvais pour être sauvé. Nul être humain n'est assez parfait pour avoir le droit de tuer celui qu'il considère à tort comme entièrement mauvais".
32. "Dès que quelqu'un comprend qu'il est contraire à sa dignité d'homme d'obéir à des lois injustes, aucune tyrannie ne peut l'asservir".
33. "Chaque homme est responsable de sa religion".
34. "Les systèmes économiques qui négligent les facteurs moraux et sentimentaux sont comme des statues de cire : ils ont l'air d'être vivants et pourtant, il leur manque la vie de l'être en chair et en os".
35. "La non-violence est la loi de notre espèce, tout comme la violence est la loi de l'animal".
36. "Nul Homme qui aime son pays ne peut l'aider à progresser s'il ose négliger le moindre de ses compatriotes".
37. "Je n'aime pas le mot tolérance, mais je n'en trouve pas de meilleur".
38. "Sans doute serais-je chrétien, si les chrétiens l'étaient 24 heures par jour".
39. "En opposant la haine à la haine, on ne fait que la répandre, en surface comme en profondeur".
40. "La règle d'or de de la conduite est la tolérance mutuelle, car nous ne penserons jamais tous de la même façon, nous ne verrons qu'une partie de la vérité sous des angles différents".
41. "Donner un verre d'eau en échange d'un verre d'eau n'est rien ; la vraie grandeur consiste à rendre le bien pour le mal".
42. "Tout ce que tu feras sera dérisoire, mais il est essentiel que tu le fasses".
43. "Colère et intolérance sont les ennemis d'une bonne compréhension".
44. "Les vérités différentes en apparence sont comme d'innombrables feuilles qui paraissent différentes et qui sont sur le même arbre".
45. "Si Dieu devait apparaître aux affamés, il n'oserait leur apparaître que sous forme de nourriture".
46. "Chacun a raison de son propre point de vue, mais il n'est pas impossible que tout le monde ait tort".
47. "Si chacun ne conservait que ce dont il a besoin, nul ne manquerait de rien, et chacun se contenterait de ce qu'il a".
48. "Par sa nature même, la vérité porte l'évidence en soi. Dès qu'on la débarrasse des toiles d'araignées de l'ignorance, elle brille avec éclat".
49. "Celui qui veut servir, ne gaspillera pas une seule seconde pour son confort personnel".
50. "Puisque j'ai rejeté l'épée, il n'est plus rien d'autre que la coupe de l'amour que je puisse offrir à ceux qui se dressent contre moi".



dimanche 26 novembre 2017

Etat des lieux

 
 
 
En 2016, les 8 multimilliardaires les plus riches
possèdent ensemble un patrimoine équivalent, en valeur monétaire,
aux maigres avoirs détenus par la moitié la plus pauvre de l'humanité,
soit 3 milliards 500 millions d'êtres humains.
 
La concentration des richesses est rapide :
le club des possesseurs de ces immenses fortunes comptait
 65 multimilliardaires en 2015,
 85 en 2014 et 388 en 2010.
 
Ces sommes colossales leur permettent de s'accaparer les ressources naturelles,
 les matières premières, les terres et les produits du travail agricole
Les peuples affamés sont des peuples soumis.
 
 Pas de mondialisation heureuse pour la majorité des habitants de la planète
 mais une marchandisation généralisée et destructrice.
.
 
Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot
"Les prédateurs au pouvoir"
.
 
 
 
 
 
 

lundi 13 novembre 2017

Paix






La paix est menacée par un ordre économique, social et politiquement injuste, 
par l'absence de démocratie, par la dégradation de l'environnement 
et l'absence de droits de l'homme.
Muhammad Yunus

La paix ? Elle ne deviendra universelle que si l'humanité est unie-vers-elle.
Grézel Christain

La paix n'est pas un don de Dieu à ses créatures. 
C'est un don que nous nous faisons les uns aux autres. 
Elie Wiesel

Nos petits-enfants seront en paix, ou ne seront pas.
René Barjavel






lundi 30 octobre 2017

Fais de ta vie une oeuvre d'art

 
 
 
Que chaque instant de ce présent si précieux,
Soit habillé de tes plus belles pensées,
De tes actes les plus nobles.
 
Fais de ta vie un hymne à la joie,
Pénètre au plus profond de la matière,
Et féconde l’obscurité de pensées lumineuses,
De fleurs de pensées 
afin d’ensemencer monde intérieur et extérieur.
Sème les graines de ta destinée,
D’une main heureuse,
D’une main amoureuse,
D’une main confiante, humble et généreuse.
 
Qu’au travers de tes expériences terrestres,
Puisses-tu faire vibrer ton âme,
Telle une harpe céleste,
Afin qu’elle prenne corps et s’exprime 
au sein même de la terre.
 
Fais de ta vie une œuvre d’art,
Et communique ton œuvre dans la matière,
Matérialise les Idées célestes,
Idéalise la matière terrestre.
Que chacun de tes gestes,
Que chacune de tes actions, de tes pensées,
Portent en elles le sceau de ton âme,
Et fleurisse dans l’Amour de l’éternel présent.
 
Fais de tes rêves de lumière une réalité sans frontière,
Sans préjugé, ni attache.
 
Détache-toi du futile trop servile
Et croit sans hésiter, lentement et sûrement,
Dans l’Inconditionnel Amour du temps,
ton plus beau présent.
.
Alain Degoumois
.
 
 
 
 
 

 


mercredi 16 août 2017

La chanson des âges perdus



Il y a quelque chose qui manque
qui manque tant
dans nos vies

Une fenêtre qui s'ouvrirait
un enfant qui sourirait
un coin du coeur qui s'enfoncerait
dans Ta grande vague
qui coulerait là
comme à jamais

Il y a quelque chose qui manque
qui manque tant
dans nos vies
Un quelque chose qui est pour toujours
qui comble chaque heure
comme une musique connue
comme une douceur perdue
et retrouvée dans cet instant

Il y a quelque chose qui crie
qui crie tant
dans nos vies

Quelque chose qui n'est pas là
et qui troue nos vies
d'une peine sans nom,
d'un appel si vieux
qu'il est comme toutes les peines
du monde
d'un appel si chaud
qu'il est comme un amour
sans fond
pour toutes ces vies
ces vies perdues

Ah ! trouvera-t-on
ce quelque chose qui manque
qui manque tant
dans une petite seconde
comme dans les âges perdus ?
.
Satprem
"La clef des contes"
.


dimanche 4 juin 2017

La révélation du silence




Extériorisant le vide interne,
nous le traduisons en vains discours
où nous restons pris 
comme des mouches dans une toile d'araignée.

En dépouillant l'instant 
de toute amarre avec sa propre transcendance
nous démolissons la vie,
même réfugiés dans l'ironie,

mais quand nous réalisons la connaissance de l'âme,
dans le densité de notre chair
s'installe une subtile transparence.

Abandonnant définitivement les mots, 
situés dans la plénitude de l'harmonie,
nous recevons la révélation du silence.
.
Alexandro Jodorowsky
"L'échelle des anges"
.


samedi 3 juin 2017

Semence nouvelle


Nous avons parfois l'impression, dans l'histoire,
que les périodes d'épreuve et de destruction
précèdent la naissance d'un monde nouveau,
mais c'est peut-être une erreur,
peut-être est-ce parce que la semence nouvelle est déjà née
que les forces de subversion (ou de déblayage)
vont s'acharner.
.
Satprem
.


mercredi 31 mai 2017

Nommer l'ombre


"Ce que maintenant nous voyons est une ombre de ce qui doit venir" 
Sri Aurobindo
.
Nous sommes à une époque où beaucoup de philosophes,
 thérapeutes ou petits maîtres de sagesse
 jouent la rengaine "du bonheur à tout prix" ,
le tout relayé par le courant psychologique à la mode
 de la pensée positive « à tous crins », venant d’outre-Atlantique.
Cette pensée positive du bonheur à tout prix me semble problématique et douteuse,
surtout quand elle déborde dans le domaine d’une spiritualité tellement bienheureuse
 qu’elle finit par sentir l’âcre parfum de l’eau de rose,
en particulier avec cette « pleine conscience »
 qui est en réalité « pleine à moitié »,
car il lui manque la partie essentielle du chemin de son évolution,
c’est à dire la nécessité pour chacun de traverser d’abord son Ombre.
 
 
Cela fait d’abord référence à ma pratique professionnelle en psychothérapie,
il s’agit de faire un long travail sur soi-même pour visiter sa part d’ombre,
afin de récupérer à la lumière de la Conscience,
toutes les zones obscures de l’Inconscient :
d’abord la programmation de l’archaïque cerveau reptilien-limbique,
faisant de chacun d’entre nous, un potentiel redoutable prédateur,
obnubilé par la survie, dans l’urgence, de son petit moi toujours en manque ;
 
ensuite vient la programmation des traumas et contrariétés infantiles,
– c’est souvent l’essentiel du travail psychothérapeutique -,
mais il faudrait aussi parler des redoutables programmations
 de la naissance et de la vie intra-utérine,
des encombrants bagages légués par les lignées psychogénérationnelles,
et pourquoi pas, comme le préconisent les traditions spirituelles orientales,
ce lourd « karma » hérité de nos vies antérieures ratées.
Le travail sur soi est immense, il n’est jamais terminé,
La Conscience n’en a jamais fini de récupérer ou d’intégrer
 toute cette inconscience humaine rendant son histoire si chaotique.

La Lumière n’en a jamais fini avec l’Ombre, son éternelle compagne de chemin,
et la pleine conscience signifie d’abord conscience de cette dualité Ombre – Lumière,
 qui est la marque obligée de la vie humaine sur cette terre.
Le pire ce sont les petits maîtres de sagesse
quand ils professent la méditation
 et son plat bonheur du moment présent.
Bien sûr, il y a cette expérience méditative indéniable,
 procurant même chez le débutant une sorte de paix et de calme intérieur,
mais cela a plutôt à voir avec un état de relaxation
physique, émotionnelle et mentale
 qui ne peut être qu’éphémère le temps de la méditation.

Sitôt de retour dans l’environnement coutumier,
les tempêtes émotionnelles de l’ego
reprennent le dessus avec d’autant plus de violence
qu’elles ont été réprimées par ces pseudo méditations du bonheur,
c’est ce qu’on appelle aussi le redoutable retour du refoulé.
Pour moi,  la méditation commence donc par la méditation sur son ombre,
c’est à dire avec les états intérieurs problématiques,
avec lesquels il s’agit de s’entraîner, encore et encore, à accueillir, observer,
 accepter avec l’oeil de la Conscience, 
toutes les sensations, ressentis et pensées délétères.

C’est au contact de l’Ombre intérieure 
que la Lumière de la Conscience se raffermit
 et prend sa dimension réellement lumineuse,
de sorte que peu à peu Celle-ci intègre et transcende
 la dualité originelle du bien et du mal, de l’ombre et de la lumière.
.
Cela veut dire que la pleine conscience n’est ni heureuse, ni malheureuse,
elle est les deux à la fois, dans un espace intérieur qui les transcende,
et qui se traduit le plus souvent par la qualité d’un certain silence,
accompagné d’un regard grave en même temps qu’amusé et distancié.
Dans la continuité de cette critique du plat bonheur méditatif,
 voulant faire l’économie de l’ombre,
je citerai volontiers Fabrice Midal 
dans une récente newsletter :
« La spiritualité comme la psychologie apparaissent aujourd’hui comme des méthodes pour ne plus être en rapport à la douleur et regarder les choses de « manière positive ». Elles nous égarent. 
Car, étrangement, si nous lisons un poème de René Char, un livre de Proust ou que nous regardons un tableau de Cézanne, nous sentons qu’il y a un élément de douleur contenu dans ces œuvres. Si nous écoutons un quatuor de Mozart ou une sonate de Schubert, nous avons parfois les larmes aux yeux — mais cela ne nous inquiète nullement et nous éprouvons même cette expérience comme bénéfique.
Pourquoi une telle différence ? L’art est-il plus près ici de la vérité que la psychologie, que la spiritualité et qu’un certain discours social aujourd’hui prédominant ? »
Je renchéris avec lui sur l’exemple d’un certain art, 
le grand art, le « grand style »,
 comme dirait Nietzsche,
quand l’artiste n’a pas peur d’exprimer l’ombre –
c’est à dire les accents de la souffrance et de la douleur mêlées –
dans une expression artistique quelle qu’elle soit,
 conduisant sur le chemin d’une rédemption possible
 par la beauté et par l’harmonie.

L’oeuvre d’art n’en est alors que plus forte, n’en est que plus intense et plus vraie,
renouant avec la grande tradition grecque de la tragédie,
au plus près de la condition humaine entre chaos et cosmos,
avec ce chemin de la conscience, très étroit, semé d’embûches et d’épreuves.
C’est sans doute en pensant à tout cela que j’ai écrit il y a quelques années
ces poèmes ombreux,
en choisissant la voie de la poésie
comme si celle-ci dans son espace lacunaire,
me paraissait plus pertinente que toute réflexion philosophique ou psychologique.
Ecrire la poésie pour se refuser à la mode prosaïque de l’époque,
user de l’image, de la métaphore, du mystère, de l’approximatif et de l’intuitif,
 pour mieux nommer l’Ombre.

 

Le peuple de l’Ombre

«Je vous écris d’un pays autrefois clair.
Je vous écrit du pays du manteau et de l’ombre.»
Henri Michaux

« Le chemin vers la lumière parait sombre…
la vraie clarté semble obscure… »
Lao-tseu   Tao tö King 41

« Celui qui refuse de voir les ombres
ne voit pas non plus la lumière »
Fabrice Midal

1
Là-bas
fin fond de l’espace
planète Terre
du côté des terrains vagues
et des friches en pleurs
du côté des cendres et de la poussière
non loin des déserts de pierres
vit un peuple obscur
tourné vers son ombre
on l’appelle le Peuple de l’Ombre.
 
2
Là-bas
planète Terre
en un coin reculé du cosmos
vit un peuple étrange
immature
toujours inquiet
toujours vêtu de noir
il aime s’entasser
dans la promiscuité de ses villes
il aime vivre en foule
pour former des cortèges de misère
on l’appelle le Peuple de l’Ombre.
 
3
On dit que le Peuple de l’Ombre
est né de la nuit primordiale
bien avant toute lumière
on dit aussi que ce peuple a chuté
d’un ancien royaume de lumière
chassé du paradis
par un démiurge malveillant
cette naissance hors de la matrice obscure
lui fait chérir l’opacité des limbes
choisir l’Ombre de l’inconscience.
 
4
Le Peuple de l’Ombre
est fasciné par le poids de la matière
son regard est tourné vers le bas
est-il riche et dans l’opulence ?
ce peuple aime accumuler les objets
jusqu’à l’asphyxie de ses déchets
est-il pauvre ?
il ne rêve que possessions et richesses
il s’exile toujours plus loin pour courir après des leurres
c’est un peuple jeune
immature
toujours inquiet
son regard est tourné vers le bas.
 
5
Le Peuple de l’Ombre est tombé
sous le charme trompeur de la matière
sa science dont il si fier
est hypnotisée par cette illusion
il en arrive même à penser que sa conscience
émane des neurones de son cerveau malade
telle une fumée opaque et mensongère.
 
6
Le Peuple de l’Ombre s’enorgueillit aussi
d’avoir inventé le nombre
il ne cesse de calculer
fébrilement son argent
avide de posséder toujours plus
sa science des chiffres
est le seul moule explicatif
pour comprendre  la magie du réel
et le rendre encore plus ombreux.
 
7
A l’ombre de ses mégapoles
derrière d’interminables murs
enfermé dans des cachots de pierre et de verre
à l’ombre des tunnels et des débarcadères
le long des routes envahies de parkings
sur des chemins implacables de fer
perdu dans l’enchevêtrement de ses désirs
la confusion de ses attentes
le Peuple de l’Ombre titube dans l’obscurité
de sa tragique histoire.
 
8
Enfermé dans des boîtes nommées bureaux
il aime traquer fiévreusement son ombre
sur une multitude d’écrans opaques
car le Peuple de l’Ombre aime l’obscurité
de ces lumières factices
où se reflète à l’infini
son ombre vacillante.
 
9
Le Peuple de l’Ombre
décidément n’aime pas la lumière
il s’enferme toute la journée
dans des salles obscures
où sur de grands écrans géants
il aime voir s’agiter la fureur
de ses accès de violences
hypnotisé par ces images
ces faux semblants mortifères
il vit dans un monde virtuel
où son ombre s’étend
toujours plus obscurément.
 
10
Le Peuple de l’Ombre ne regarde plus le ciel
depuis longtemps
cerné par de grands murs de pierre
caché derrière la virtualité de tous ses écrans
il s’est voilé la face
il se protège du mystère
de ces espaces infinis qui l’enserrent
il suit son chemin d’obscurité
au plus profond de la vallée.
 
11
Le Peuple de l’Ombre va mal
il se sent souvent déprimé angoissé
anxieux maniaque hystérique obsédé
alors il consulte une multitude de  “psys”
dont le travail consiste à lui faire visiter
son ombre.
 
12
Pour transformer l’ombre en lumière
il faudrait juste s’arrêter
rester là immobile
dans le moment présent
accueillir ce qui est là
en toute conscience
mais le Peuple de l’Ombre n’aime pas
cette immobilité qui l’angoisse et l’inquiète
il préfère s’agiter en foule avec fébrilité
dans l’ombre de ses villes.
 
13
Quand le Peuple de l’Ombre
se sera décidé à mâcher patiemment son ombre
alors peut-être passera-t-il enfin
dans la lumière,
empruntant l’étroit sentier
de la claire conscience
il prendra son envol
dans les hautes sphères.
 
14
Mais en vérité le Peuple de l’Ombre
n’est pas prêt à changer
il est là de toute éternité
pour permettre à la lumière
de jouer avec son ombre
il est le terreau
sur lequel à certains endroits
s’épanouissent parfois quelques fleurs rares
il fait partie de ce jeu mystérieux
consistant à faire sans cesse émerger de son Ombre
quelques éclats de la Lumière.


dimanche 28 mai 2017

Points de résistance

 
 

 
 
Lire et écrire sont deux points de résistance
à l'absolutisme du monde.
.
Christian Bobin
"Les ruines du ciel"
.

 

samedi 27 mai 2017

Poésie et pouvoir

 
  
 
Quand le pouvoir pousse l'homme à l'arrogance,
la poésie lui rappelle la richesse de l'existence.
Quand le pouvoir corrompt,
la poésie purifie.
.
.

 
Si la société évacue la poésie
comme mode d'expression non productif,
c'est peut-être que la poésie est un foyer de contestation,
une incompatibilité fondamentale
avec le système dominant ?
.
Jean Rouaud
.

 


jeudi 25 mai 2017

Le pouvoir des mots




 
 
 
La langue joue un rôle primordial dans l'exercice de la domination :
le pouvoir, conscient des limites de la force brute, s'évertue,
pour contrôler les esprits et les comportements, à contrôler les mots.
(...)
L'incarcération industrielle est d'abord l'enfermement
dans une langue rigide et impersonnelle
 comme un automate de station service.
 
Si me manquent les mots pour simplement identifier et nommer ce qui m'écrase,
me manquera du même coup la possibilité de penser mon émancipation,
 à plus forte raison d'y travailler
 
"Chaque année , de moins en moins de mots,
et le champ de la conscience de plus en plus restreint"
(George Orwell-1984)
 
L'impuissance -et la violence qui finit toujours par tenter d'y remédier -
commence par notre impuissance à dire ce qui nous arrive.
 La pensée et l'action sont tributaires de la langue,
sauf à accepter de ne plus laisser parler que tout ce qui, en nous impensé,
est le plus aisément manipulable (peurs, envies, pulsions).
 
Quoi de mieux pour faire accepter la machine et sa logique
qu'une langue elle-même mécanisée,
 tout entière vouée à l'industrialisation des consciences
 et à l'intériorisation des impératifs de la marchandise ?
 
Lorsque l'ordre établi l'est dans la langue, il l'est dans les esprits,
 plus rien ne le menace.
 


 
 
Tel est le but de la "nov'langue" :
outil d'asservissement des consciences, inventé par Orwell dans 1984,
elle est la langue de bois portée par l'esprit totalitaire à son expression la plus aboutie,
c'est-à-dire au stade d'une pétrification qui interdit toute pensée,
 étant entendu qu'une pensée digne de ce nom est nécessairement en mouvement
.
Ne voyez-vous pas que le véritable but de la novlangue
 est de restreindre les limites de la pensée ? affirme Syme,
un des concepteurs du dictionnaire de novlangue dans le roman.
Cette novlangue, loin d'être l'apanage exclusif des Etats totalitaires,
 accompagne dans nos sociétés industrielles la folie marchande
qui assigne le réel à résidence pour mieux l'évacuer,
le remplacer par ses ersatz et laisser le consommateur
face au vide d'une existence qu'il ne peut plus combler
 que de faux besoins et d'objets manufacturés.
Il voue alors à ces derniers le culte 
que vouaient jadis aux choses de la nature
ceux qu'il nomme avec mépris des "primitifs".
 
Priver l'homme des mots, c'est-à-dire de la capacité de donner du sens,
revient à le priver d'un monde concret et de la possibilité
 de s'extraire du spectacle de la marchandise.
S'attaquer au langage permet de soumettre l'individu, vide et malléable,
 aux impératifs immédiats de la survie consumériste.
 
Allez, après ce matraquage, systématique depuis le plus jeune âge,
 lui retirer ses joujoux dans sa niche, ses gadgets et ses drogues,
 ou simplement lui expliquer
-et avec quels mots ?- 
que son mode de vie, son confort, sa jouissance,
ne pourront indéfiniment se prolonger 
sans menacer la survie de la planète,
 des espèces vivantes et la sienne.
 
La domination industrielle, 
totalitarisme "doux" et sournois,
 procède ainsi, pour se perpétuer,
 d'un véritable rapt de la conscience :
il s'agit de permettre et d'imposer
 l'intériorisation de la servitude
 en sorte qu'elle ne soit pas seulement
acceptée par résignation ou impuissance,
mais réclamée, qu'elle devienne "naturelle".
 
Or, contre cela, le langage est la première barrière. 
Ce travail d'intériorisation passe nécessairement 
par le langage et la faculté symbolique.
Afin de permettre à chacun de remplir son intériorité
 des objets du monde magique de la consommation,
il n'est pas d'autre chemin, pour commencer,
 que de vider la langue de son contenu et de ses fonctions,
 de faire tomber cet obstacle qu'est la faculté symbolique, qui tient à distance,
et, dans l'écart ainsi créé entre le mot et la chose, permet de dire et de penser.
 
Pas d'autre chemin, donc, que d'en finir avec cet archaïque idéalisme
 qui consistait à donner du sens aux sons qui sortent de nos bouches 
 et du sens à ce qui nous entoure.
Ainsi s'assure-t-on que l'individu collera parfaitement
 au monde factice des écrans.
 
D'où l'urgence, pour tous les pouvoirs,
 de détruire les mots et la langue dans son ensemble :
"C'est une belle chose, la destruction des mots" dit encore Syme.
Une langue déstructurée, c'est une réalité et un individu déstructurés,
un individu privé de repères et de sa capacité à les construire,
privé de lui-même, qui ne s'en raccrochera que plus facilement
 aux hochets de la consommation qui tournent sans fin
au-dessus de son berceau où on le maintient.
 
 Comme l'écrivait Günther Anders,
 dont la pensée est souvent cousine de celle d'Orwell :
 
"La vie et l'homme deviennent eux aussi plus grossiers et plus pauvres,
 parce que le "cœur" de l'homme -sa richesse et sa subtilité-
 perd toute consistance sans la richesse et la subtilité du discours;
 car la langue n'est pas seulement l'expression de l'homme,
mais l'homme est aussi le produit de son langage;
 
 bref, parce que l'homme est articulé comme lui-même articule,
 et se désarticule quand il cesse d'articuler."
.
 
Stéphane Leménorel
"George Orwell ou la vie ordinaire"
.